CATASTROPHE ÉCOLOGIQUE EN SERBIE...

chronique funeste par Steph ELV, diffusée le 18.VII.99
Alors que l'on continue de découvrir des charniers au Kosovo, preuve que la précipitation de l'OTAN dans le coup de force a au moins servi à une chose : la politique d'extermination du pouvoir serbe, un autre aspect des conséquences funestes de cette guerre montre le bout de son nez : la catastrophe écologique.

Les bombardements à répétition d'usines en Serbie ont enclenché un processus de pollution dont risquent de souffrir tous les pays du sud-est européen.

A Novi-Sad (2e ville de Serbie, grand centre industriel), les raffineries de pétrole bombardées le 1er mai ont brûlé pendant 11 jours, avec émissions de fumées toxiques, inondations de boues toxiques chargées en hydrocarbures, qui ont fini par se déverser dans le fleuve du coin (un tout petit fleuve : c'est le Danube), tout ceci agrémenté de mousse anti-incendie, un produit impeccable pour lutter contre le feu, et de plus très polluant, surtout dans les énormes quantités qu'il a fallu utiliser pour cette occasion.

A Pancevo (150.000 habitants), nos militaires, fer de lance de la démocratie, ont généreusement bombardé 3 complexes industriels :
  • la raffinerie ;
  • une usine de matières plastiques ;
  • une usine de produits azotés.
Cette dernière, bombardée le 18 avril, a laissé échapper du chlorure de vinyle (monomère du PVC), produit hautement cancérigène, dont la concentration atteignit jusque 10.000 fois le niveau normalement admis. Tout ça a ensuite été lavé par la pluie et s'est retrouvé dans les cultures maraîchères et fruitières environnantes.

On peut multiplier ces exemples à l'envi : pollution de l'air, de l'eau, de la terre, par des hydrocarbures, de l'ammoniaque, des métaux lourds, et le pyralène des transformateurs électriques incendiés.

On peut aussi évoquer le black-out sur toute information : officiellement, le gouvernement yougoslave assure qu'il ne se passe rien, et empêche les curieux, qu'ils soient scientifiques, journalistes ou simples citoyens, de répandre des nouvelles qui pourraient aider l'opposition au régime. A Pancevo (voir ci-dessus), une équipe canadienne de télévision n'a ainsi pas pu aller enquêter sur le terrain. De nombreux chercheurs subissent des pressions réitérées visant à les empêcher de publier des résultats de leurs analyses.

Bref, tout va bien en République Fédérative de Yougoslavie. Mais il existe quand même des fonctionnaires pour rompre la loi du silence et ne pas vouloir voir crever leurs concitoyens pour la plus grande gloire du régime.

Entre autres, un nommé Simon Bancov, qui travaille pour le Ministère de l'Agriculture, évoque le principal indicateur officiel de pollution : l'interdiction de la pêche. Le poisson local a en effet été déclaré dangereux pour la santé (ils n'ont pas pu se retenir).

Même chose pour les oeufs, la viande, qui sont à manipuler avec les plus grandes précautions, et l'eau bien sûr, toujours l'eau, où se retrouvent dérivés du benzène, pyralène (dont 1 litre suffit à empoisonner 4 millions de litres d'eau), mercure... Avec à la clef les fausses couches, naissances monstrueuses, enfants nés malades du foie, du système nerveux, quand ce n'est pas avec des organes manquants. Des pédiatres de la région de Belgrade rapportent l'apparition récente d'allergies nouvelles et inexplicables.

Tout ceci a été relevé par des équipes d'enquêteurs de l'ONU, et dûment consigné dans un rapport au secrétaire général des Nations-Unies Kofi Annan. Reste à mettre en place dare-dare la dépollution, un processus long, coûteux, et inaccessible à un pays en grande partie détruit comme la Yougoslavie. Le seul espoir est l'aide de pays industriels, aide refusée jusqu'ici pour motif de dictateur au pouvoir. Croisons-nous donc les bras, drapés dans nos grands principes qui n'ont empêché ni le massacre des Kurdes, ni celui des Tutsis, ni celui des Soudanais, même pas celui des Albanais du Kosovo.

Vive la démocratie.



Ce texte est en grande partie inspiré d'un article paru dans The Independent (Londres) du 2 juillet, écrit par Milenko Vasovic, un journaliste bossant aussi pour l'IWPR (Institute for Peace and War Reporting).
Si le sujet vous intéresse, le site du Vort'n Vis présente tout un tas d'informations et de discussions sur la guerre du Kosovo et ses conséquences.




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